LAND OF QANATS - 2017
documentary project about drought issue in Iran

Voilà longtemps que l’on creuse dans la région désertique de Dasht-e-Khak. Située au centre de l’Iran dans la province de Kerman, ces terres ancestrales ne cessent de se creuser.
Il y a environ 3000 ans, les ancêtres perses défiaient déjà la nature en cherchant à rendre plus hospitalier cette région semi-aride. Ils inventèrent le qanat pour trouver l’élément essentiel à la vie. Ouvrage minier ingénieux et complexe, le qanat consiste à capter l’eau d’infiltration à l’aide de puits d’accès vertical et de galeries souterraines. Le précieux liquide pouvait alors être acheminé jusqu’à la surface et cela de manière constante, tout au long de l’année, permettant ainsi d’irriguer les terres et d’y vivre durablement.
Les bords de ruisseaux et les lieux propices à la construction de qanats permettaient ainsi depuis plusieurs siècles aux habitants de vivre en quasi auto-suffisance. Ces oasis verdoyants de vie étaient une belle démonstration du pouvoir d’adaptation de l’homme. Preuve de son désir de vivre plutôt que de survivre.
« Étaient » car depuis une quinzaine d’années, les rivières sont asséchées et le ruissellement des qanats se tarit lentement, inéluctablement. Désormais, seul la couleur sableuse du sol, des maisons et des arbres morts habillent uniformément les lieux. Le réchauffement climatique et la mauvaise gestion de l’eau sont cités comme raisons principales de cette sécheresse soudaine. Alors qu’un certain équilibre existait depuis des siècles, le futur semble incertain et sans espoir.
Près du village de Khatm, on continue de creuser mais dans un tout autre but. Les galeries sont plus grandes et plus profondes. Elles s’enfoncent dans les entrailles de la terre et se ramifient sur des kilomètres. Leurs renforts de béton et de métal souvent fissurés luttent contre la pression des monts qui les dominent. Désormais, on creuse pour le charbon. Et celui-ci se paye au prix de souffrances et parfois même de vies.
Étonnamment l’eau ruisselle abondamment dans la mine. Cependant, à la lumière du jour on s’aperçoit qu’elle n’est plus limpide mais d’une profonde noirceur. Contaminée par cette ressource soit disant bienfaitrice qui comble une bonne partie des besoins énergétiques du pays.
Aujourd’hui, la majorité des habitants de la province de Dasht-e-Khak ont fuit la précarité due à la sécheresse par l’exode ou par le travail dans les mines. Alors que cette activité est en partie à l’origine du gaspillage excessif et de la pollution des eaux souterraines, elle est aussi responsable insidieusement des conséquences du réchauffement climatique qu’elle nourrit à différents niveaux.
Depuis une dizaine d’années, l’Iran souffre d’une pénurie d’eau sans précédent. Les sources ne se régénèrent plus comme avant, laissant la population locale s’appauvrir et sans espoir. En 2016, les autorités affirmaient que 72% des iraniens vivaient dans des conditions de sécheresse prolongée et que des coupures d’eau menaçaient neuf grandes villes, dont la capitale Téhéran. Malheureusement, l’histoire récente a su nous montrer que de ces contextes critiques naissaient des crises politiques majeurs parfois internationales à l’image de la guerre en Syrie.
Ce n’est pas l’histoire de la mort d’une région mais de sa mutation. La mutation d’un territoire, d’un mode de vie, d’une économie. Celle aussi des paradigmes qui évoluent dans nos sociétés modernes où le profit, l’exubérance énergétique et la croissance semblent primer sur la pérennité de la vie et de l’environnement. Les images se veulent être des miroirs ou des fenêtres afin de se questionner, essayer de prendre conscience de l’état de notre monde.
LAND OF QANATS










































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